Archéologie aérienne J. Dassié. Cartographie

CARTOGRAPHIE

  La cartographie constitue une aide indissociable des prospections aériennes. Que ce soit au sol ou en avion, il arrive toujours un moment ou l'on doive identifier un point numérique ou une image, sur une carte : c'est la localisation. Cette localisation permettra de connaître :
      Les coordonnées administratives : département, canton, commune, code INSEE, cadastre, lieudit.
      Les coordonnées géographiques : latitude et longitude
      Les coordonnées kilométriques Lambert : X et Y (et même Z), tellement rapides à utiliser en vol.
 
      Se localiser en vol, avec précision, n'est pas chose facile au bout d'une heure de prospection, alors que l'on a tourné et zigzagué sans arrêt, à la recherche des sites éventuels. Et puis soudain, des traces incontestables apparaissent ! On tourne autour, on les photographie, et puis arrive le moment fatidique de l'enregistrement des informations au magnétophone ! Il suffit d'entrer un way-point sur le GPS et d'indiquer son numéro avec le ou les numéros des photos associées. C'est très facile, la véritable localisation étant reportée à plus tard, dans le confort du bureau !
    La collection de cartes emportée en vol : cartes IGN au 1/50 000e. Notre bagage de vol comprend une soixantaine de cartes couvrant une zone d'une centaine de Km de rayon. Les sites découverts y sont représentés par des points rouges, bien visibles.

La collection de référence, détenue au bureau, comprend un centaine de cartes IGN au 1/25 000e. C'est sur cette collection que sera tracé en rouge la forme la plus représentative des sites découverts, ainsi que celle des traces photographiées mais non encore reconnues comme archéologiques. C'est au bureau que se traitera l'important problème de la localisation précise des découvertes.

Les enregistrments GPS des way-points fourniront les coordonnées de chaque points, en degrès et minutes décimales ou en coordonnées Lambert, plus immédiates à utiliser. Il reste un point important : pour chaque image, donner la direction précise de l'axe de la photographie. La seule solution que j'ai trouvé pour cela a été d'utiliser l'heure de prise de vue et la date (enregistrés par le GPS) pour, avec un logiciel de calculs astonomiques, déterminer rigoureusement la direction des ombres (pour autant qu'il y en ait...). Cela permettait ainsi une orientation réaliste de la photo par rapport à la carte, facilitant ainsi la localisation d'un site à une dizaine de mètres près.

Cartographie

      La cartographie permet aussi de représenter les résultats des prospections archéologiques aériennes sous une forme très synthétique. Elle convient tout particulièrement pour les articles et les grands rapports généraux. Nous donnons ci-après un exemple de réalisation cartographique. Le fond utilisé peut être de deux origines :
La carte IGN scannée (autorisation de publication à demander) ou le fond cartographique numérique, vendu par l'IGN
Le fond cartographique dessiné, plus lisible dans le cas de nos applications. C'est le cas de l'exemple suivant :

Cartographie de répartition des enceintes néolithiques du Sud Poitou-Charentes.

(Les numéros correspondent aux numéros des sites de la Banque Archéologique Poitou-Charentes)

Une retombée cartographique : la métrique des voies.

      Les prospections aériennes sont un moyen efficace de suivre ou de retrouver le tracé des voies antiques, gallo-romaines en particulier. Ces voies étaient généralement bornées par des monolithes (les bornes milliaires) qui exprimaient les distances entre cités et/ou limites des cités, depuis le point considéré. Les unités utilisées étaient, selon la région des Gaules, des milles, ou milliers de double pas d'environ 1,48 mètre = 1481 mètres pour le mille, soit des lieues (leugae). La valeur de la lieue telle qu'édictée par Rome, est parfaitement définie par les textes anciens : un auteur latin, Ammien Marcellin, a donné l'équivalence entre lieue et mille dans un passage célèbre ou il écrit " de l'endroit ou les enseignes romaines avaient commencé à se mettre en mouvement jusqu'au retranchement barbare, on comptait 14 lieues, c'est à dire 21000 pas ". La lieue valait donc 1 mille et demi, soit 2222 mètres. C'est la valeur admise par les grands ouvrages de référence et enseignée dans nos universités.

      Oui, mais, si cette valeur paraît convenable en Narbonnaise, par exemple, il est d'autres régions où , quelle que soit la méthode d'analyse adoptée (Itinéraires anciens, épigraphie milliaire, rémanence topographique), on retrouve des modules de distance d'une valeur sensiblement plus élevée, de 2400 à 2500 mètres. Nous appelons cette unité d'origine indigène la lieue gauloise par opposition à celle de 2222 m ou lieue romanisée. C'est le cas en Poitou-Charentes où la recherche de la métrique des voies est l'un des éléments concourants à l'identification des lieux gallo-romains. C'est grâce à ces méthodes que nous avons pu identifier Barzan CM avec la Novioregum de l'Itinéraire d'Antonin, en partant d'une métrique d'environ 2415 mètres. On peut supposer que la lieue romanisée résulte d'une "adaptation" d'une unité indigène afin de la rendre compatible avec les unités romaines. Deux lieues pour trois milles, un rapport rond.

 

Tableau des concordances et discordances de l'Itinéraire d'Antonin pour des valeurs de lieues de 2222 mètres et 2450 mètres. La correction de l'indication du segment Rom-Poitiers est nécessitée par une erreur du copiste qui a confondu un X avec un V dont les branches se croisaient un peu haut. Ce type d'erreur est très fréquent dans les manuscrits.

Notre étude plus détaillée, publiée par le CNRS, peut être trouvée ici : "La grande lieue gauloise".